Les seules frontières naturelles sont celles de l’individu !

Il paraît que je suis française… Que je doive m’intéresser à l’histoire de MON pays, de MES ancêtres… Il paraîtrait aussi que je dois me sentir appartenir au pays dans lequel j’habite. Bizarrement, ce n’est pas le cas…
On me rabâche à longueur de journée (à la fac, à la TV, à la radio, dans les journaux, dans les discussions…) que l’Etat-Nation est en crise… Le « sentiment d’appartenance au pays dans lequel des personnes vivent » serait dépassé…

« Quelle horreur » clament en cœur ceux qui parlent d’« intégration », ceux qui fantasment sur leurs belles frontières, ceux qui s’offusquent de toute différence de mentalité ou de conception de la vie dans leur joli pays ! Car, nous dira-t-on, « si des individus viennent chez nous et s’installent comme s’ils étaient chez eux, c’est la porte ouverte à TOUT ». Effectivement, chers lecteurs : vous rendez-vous compte du danger qui plane sur notre nation ? Des individus qui sont nés sur un bout de terre se déplacent et viennent vivre sur un autre bout de terre ! Et en plus de ça, au lieu d’être reconnaissants envers les dirigeants qui ont daigné les accepter sur le morceau de territoire qu’ils gouvernent, ces « étrangers » se croient tout permis et se mettent à faire ce qu’ils veulent ! Imaginez un peu la catastrophe que représente un sifflement de la Marseillaise !
Le pire de toute cette histoire est que ce raisonnement est malheureusement accepté par une majorité de la population…

Quelques définitions

La définition de « population » que nous donne en cours notre prof de droit public est la suivante : « La population est l’ensemble des personnes qui vivent sur un territoire donné et qui sont soumises à une autorité politique donnée : cette population doit appartenir et se sentir appartenir à l’État ».

Cette phrase révèle à elle seule de quelle manière les personnes qui nous dirigent nous considèrent : nous sommes la propriété de l’État. Nous lui appartenons donc lui devons une obéissance passive et stupide. Qu’est-ce qui arrive si, pour une étrange raison, vous n’estimez n’appartenir qu’à vous-même ? Vous avez déjà tous dû en faire l’expérience, pas besoin de détailler la puissance de la répression étatique et policière partout où il y a subversion…
« Propriété de l’État »… ils nous considèrent vraiment comme des incapables, nous ne sommes rien pour eux ; nous sommes de la chair à canon : pas étonnant alors de constater avec quel culot les chefs, bien planqués derrière leurs bureaux de décideurs, nous ont toujours envoyés à l’abattoir lors des différentes guerres, censées « sauver la patrie »… Mais quelle patrie ?!
La Terre est pourtant à l’origine faite pour que nous nous y baladions à notre gré, pour que l’on bouge, pour que l’on s’installe à un endroit désiré si l’on s’y sent bien…
Les frontières ne servent à RIEN sinon à éloigner, cloisonner les individus (« diviser pour mieux régner »), leur tracé est très souvent totalement artificiel et n’est que le fruit d’une histoire de « conquêtes » et de « pertes » de territoire par les rois et dirigeants sanguinaires. Faisons table rase de telles absurdités inutiles : la Terre est à tous, liberté de circulation, liberté d’existence ! Ni papiers ni nations : vive l’autogestion !

À propos du bourrage de crâne patriotique

Le sentiment national est censé être inné, « ancré » en quelque sorte dans nos gênes à la naissance. On oublie trop souvent que c’est l’éducation que l’on reçoit qui forge ce sentiment : en d’autres termes, le sentiment d’appartenance à un pays est artificiel, tout aussi artificiel que les frontières.
Cette socialisation, cet apprentissage, ce bourrage de crâne patriotique et nationaliste est inculqué dès la plus tendre enfance, et ceci par :

• L’éducation : Dès la naissance, la famille joue un rôle socialisant de grande importance. En effet, c’est elle qui va inculquer la base des pensées de l’enfant, et c’est elle qui va lui apprendre que « son » pays est la France (et ça tombe bien d’ailleurs, puisque selon beaucoup de gens « ON est les meilleurs »).

La phrase qui suit a été écrite très sérieusement par un auteur de grande renommée dans le milieu universitaire : « Ce destin commun est mémorisé, transmis de génération en génération par la famille, les chants, les musiques, les danses, les poésies et les livres, puis par l’école qui intègre le passé national dans l’esprit des enfants, où sont ressuscités les souffrances, les deuils, les victoires, les gloires de l’histoire nationale, les martyres et exploits de ses héros. Ainsi, l’identification à soi du passé rend présente la communauté de destin ». La fin surtout est éloquente… car c’est le bourrage de crâne qui donne à l’enfant cette sensation d’« unité de la nation ».

C’est la même chose que l’on retrouve dans le sport de haut niveau : l’équipe nationale est largement mise en avant. J’adore entendre des commentaires du genre : « ON a gagné ! ». Qui a gagné ? Qui d’autre que ceux qui ont joué ont gagné ?! Moi, je n’ai rien gagné du tout, et toi ? « ON est les champions » ah bon ? Et de quoi ? Lorsque l’équipe de France remporte une victoire, on entend souvent « fier d’être français » : je pense plutôt qu’une fois encore, la majorité des personnes cherche à s’identifier à des gagnants ; alors quand on leur dit que « la France et les Français ont gagné », il est aisé de s’approprier cette victoire pour en tirer un prestige personnel. On cherche toujours à se placer dans le camp de ceux qui ont le prestige, donc même des personnes qui n’ont aucun sentiment national se déclareront « fière d’être française » parce que pendant un laps de temps, « français » signifie « gagnant »…

• L’école : Le summum de la socialisation ! On retrouve la même chose de façon plus marquée encore : que ce soit en Géographie, en Histoire, en géologie… Tout, tout, tout sur les départements français, l’histoire de la France, les spécificités françaisesPas plus, pas moins.

Pourtant, en ce qui me concerne, j’habite plus prés de l’Espagne que de Paris ; aussi, je suis susceptible d’y aller plus souvent (je ne suis d’ailleurs jamais allée à Paris, mais dans une quantité de pays avoisinants la France). Bien sûr que l’Histoire est importante ! Mais pourquoi la limiter de manière aussi rigide et stupidement bornée à « nos » frontières ? Pourquoi détailler inutilement des points qui se sont déroulés en France, mais sans grand intérêt, alors qu’on ne connaît même pas la BASE même de l’histoire de contrées voisines ? Souvenons-nous des élèves indochinois ou africains à qui on enseignait à l’époque coloniale « l’histoire nationale », c’est-à-dire l’histoire française !

Il faut aussi savoir que les manuels scolaires d’histoire sont comme par hasard censurés par le ministre de la Défense (entendez le ministre du Meurtre légal), et les affiches antipatriotiques ou « scandaleusement anti-militaristes » ont par exemple été retirées… Ne supporte-t-on pas la contestation ? Aurait-on peur qu’un son de cloche différent (de la soupe prédigérée que nous servent les profs anesthésiants) donne des idées aux moins naïfs ? L’école forme les futurs « citoyens » : vous avez dit bourrage de crâne ?!

Un autre exemple : en économie, les raisonnements se font avec deux agents économiques : « l’économie nationale » et le « Reste du Monde ». Le « reste du monde » ? Il n’y a pas mieux comme exemple : « nous… et les autres ». Le revenu national est excédentaire (= notre pays exporte plus qu’il n’importe) ? Tout va bien ! Et cela même si c’est parce que des millions de pauvres bougres triment pour survivre, consommant avec joie de beaux Euros péniblement acquis, ce même Euro qui est cause de la merde dans laquelle ils vivent…

• Les médias quelque qu’ils soient. Remarquez de quelle manière ils nous rabâchent ce sentiment national : à n’importe quelle catastrophe par exemple, on peut entendre en France : « … 54 morts, dont 3 Français ». En Italie : « … 54 morts dont 2 Italiens ». Au Mali : « … 54 morts dont 8 maliens »… et ainsi de suite.

Pourquoi mettre en avant ces précisions ? Est-ce que cela rajouterait de la gravité à l’événement, ou au contraire l’amoindrirait si aucune mort française n’était dénotée ? Est-ce que la vie des autres individus — ceux qui ne sont pas nés à l’intérieur des mêmes frontières — compte moins que celle des autres ?! Est-ce que ces précisions n’ont pas pour but de se dire : « Ah, ça va, ON n’a pas trop été touchés… » ou « Boudu ! Quelle catastrophe, tu as entendu ? La moitié au moins des morts sont des Français… ».
Quand on nous annoncera par contre aux infos qu’une famine est à l’origine de la mort de centaines de Sud-Africains, la réaction ne sera pas la même ; « oh, moi, ça me fait rien : dans ces pays, c’est commun… De toute façon, c’est loin de la France ».

De l’absurdité du nationalisme

Dans les discours officiels, c’est le même baratin : il doit y avoir une unité de la population pour s’unir et participer à la croissance du pays…
L’important est que « l’économie nationale se porte bien », nous disent nos chers dirigeants. Dîtes-vous qu’en Finlande, au Brésil, au Canada… c’est le même raisonnement capitaliste qui prévaut : faire du profit.
« L’économie nationale doit être excédentaire » = « on doit exporter plus qu’on importe » = « vendre plus qu’on achète ».
Expliquez-moi COMMENT peut-on croire qu’une économie capitaliste est porteuse de croissance alors que par définition, pour qu’un pays puisse croître, il faut qu’un autre décroisse ? Mais, dira-t-on, « on s’en fiche des autres »… On s’en fiche du « reste du monde »… Les autres, ceux qui habitent loin, devraient se la fermer et travailler encore plus ? Pour que ce soit « leur » pays qui soit excédentaire ? Alors qu’encore une fois, la majorité ne touchera rien des bénéfices réalisés, qu’ils vivront — comme nous — comme des zombies qui survivent, des passifs qui perdent leur vie à la gagner ? Tous dans la même galère alors brisons nos chaînes partout où il y a oppression et solidarité internationale !

Jusqu’à quand cela va-t-il durer ?

Il est intéressant de déterminer à QUI bénéficie cette unité nationale, QUI profite d’une cohésion patriote du pays ? QUI utilise cet argument et cherche à pérenniser ce sentiment ? QUI d’autres que ceux qui ont TOUT A GAGNER à ce que personne ne remette en cause cet état de fait, l’exploitation quotidienne de la majorité au profit d’une minorité ? La réponse est simple, il suffit d’écouter l’ancien ministre de l’Intérieur en 1998, après la coupe du monde : « l’État français a largement bénéficié de cette victoire ! En effet, tout au long de la Coupe du Monde, les actes de vandalisme à l’égard des symboles de l’État français ont diminué de 46 % en moins d’un mois : c’est un record ! ».

Des affiches de Pétain disaient : « patrons, ingénieurs, ouvriers : tous ensemble pour la cause nationale ». Les choses n’ont absolument pas évoluées, rendez-vous compte par vous-mêmes !

Face à toutes ces absurdités illogiques, affirmons-le encore une fois :

Ma patrie, c’est le monde,
Ma
famille c’est l’humanité !

Le chantier qui nous attend pour construire un monde libre est suffisamment important pour que l’on se passe de l’aide de quelques-uns : alors sans barrières ni frontières, retroussons nos manches et serrons-nous les coudes.
Toute personne qui est capable de ressentir de l’angoisse quand on assassine un individu quelque part dans le monde et d’être exaltée quand se lève quelque part un nouveau drapeau de la liberté est internationaliste ; celui qui ressent comme un affront personnel toute agression, tout affront à la dignité et au bonheur de l’homme, n’importe où dans le monde est internationaliste.
Je suis internationaliste, car je ne me demande pas à chaque guerre si les victimes seront de mon pays ou non : je suis CONTRE la guerre…
Je suis internationaliste, car je vois dans l’enfant soudanais qui crève de faim à cause de l’impérialisme capitaliste le même p’tit gosse que je croise tous les matins dans la rue…
Tous les individus sont égaux, peu importe leur lieu de vie ou leur lieu de naissance. Égale considération pour tous.

Vive la révolution internationale !

STORM L’APATRIDE

Paru dans le numéro 31 du journal des JL « Il était une fois la révolution, con ! ».