Contresens

Extraordinaire ! Oui, mais ai-je bien vu ? Le mot « anarchie » figure bien sur la une des quotidiens ces temps-ci, il passe même à la télé ! Maintenant, passons au léger problème de son application : la guerre en Irak.

Selon ces médias, l’Irak serait dans une situation d’anarchie… Entendons-nous, ils veulent dire un désordre total, un chaos indescriptible. Le pays est à feu et à sang, les pillages sont devenus la principale forme d’économie pour quelques jours. Les capitalistes, les islamistes, etc.… Laisse passer ce moment d’intense agitation (les Irakiens ayant besoin d’évacuer le souvenir de Saddam Hussein) pour pouvoir ensuite se réapproprier le pays et mettre la main sur le nouvel État.

Mais pourquoi utiliser le terme « anarchie » pour un état de la société qui n’y correspond pas du tout ?

D’abord, cela réconforte notre si chère démocratie, on ne se rend pas assez souvent compte de la « chance » que l’on a de « vivre dans une République démocratique où l’on a le droit d’exprimer ses opinions… » (Et tout le baratin habituel)… Les articles incriminés montrent la nécessité d’instaurer rapidement un État, avec sa hiérarchie, sa police pour surveiller les puits de pétrole…

De l’ordre, voilà ce qu’il faut ! Comme si les habitants de l’Irak n’avaient pas les moyens de s’organiser eux-mêmes et sans chef. Bien entendu, passer d’une dictature implacable à un système autogéré paraît utopique (les Irakiens ont été assommés pendant des décennies par un discours unilatéral et n’ont donc jamais pu s’y opposer), mais il faudrait profiter de ces moments de non-État très rares pour pouvoir y développer nos idées, bien que ce ne soit pas très facile en pratique.

En outre, cette utilisation erronée de notre « rêve » la discrédite totalement. L’anarchie ne serait que pillages, destructions et désordre qui ne mèneraient à rien. Donc à éviter. Ils nous donnent une image exclusivement négative qui ne peut que détourner les non-libertaires de nos idées et de nos convictions.
Il faudrait cesser de nous prendre pour des casseurs, mais plutôt pour des constructeurs de paix, de liberté, de bonheur… Or ceci, les médias ne veulent ni l’entendre ni le comprendre. Ils adorent donner des étiquettes à leurs ennemis : cela plaît à un certain public, paraît-il… Les médias sont dans une logique de vente : « ne prends pas le public pour des cons, mais n’oublie jamais qu’ils le sont ».

Et tout le problème est là : l’opinion publique est victime d’idées toutes faites, les mots « anarchiste », « libertaire » sont utilisés pour tout et n’importe quoi.
Samedi dernier encore, j’ai entendu Mathilde Seigner à la télé (excusez-moi de ce moment de folie, mais je me marre dès que je vois sa gueule) prononcer le terme « anarchiste » à son égard. Et elle ajoute : « je me fous de la politique, bien que je puisse avoir de la sympathie pour certains hommes politiques, de gauche comme de droite, notamment le gouvernement actuel », fin de citation… En gros, Mathilde joue le rôle stéréotypé de l’adolescente révoltée, mais qui ne sait pas pourquoi elle se révolte.
Je crois que le moment est venu de réaffirmer clairement nos positions à l’opinion publique, complètement désinformée. Pour eux, nous sommes des antitout, qui ne savons que détruire au lieu de construire. De plus, une grande partie des masses ne pense pas réalisable une société sans hiérarchie, leurs chefs leur ont enlevé de l’esprit que les gens étaient capables de s’organiser tout seuls.

Il faut absolument rétablir la vérité sur ces 2 points, sans quoi nous resterons à jamais un mouvement caché, discrédité et finalement irréalisé.

Merci à :

STRAGEN

… pour sa participation au journal !

Note :

Anarchie : signifie absence d’autorité
Anomie : signifie absence d’ordre

Paru dans le numéro 30 du journal des JL « Il était une fois la révolution, con ! »